vendredi 27 février 2015

Calendrier pompier 2015. Février : Petit journal, supplément illustré 10/11/1907

Bonjour,
Je profite que l'on soit encore en février pour vous refourguer vite fait mon image du calendrier pompier pour février, justement... Dites moi, "refourguer vite fait", je l'ai vraiment écrit, ou bien ?... Ah oui, tiens. Bon.


  • La France entière n'est pas très très contente dans le n° du 10 novembre 1907 du Supplément illustré du Petit journal :
Comme quoi non, les gens n'ont jamais aimé les assiettes et plats décorés.
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 


Et pourquoi elle est pas contente la France entière en 1907 ? Parce qu'on l'a trahie, avec revente de secrets militaires et tout le toutim... Ça ne vous rappelle rien à vous ? Oui, ben ça le rappelle aussi à d'autres qui mettent assez facilement en avant que l'un, Ullmo, est juif et l'autre, Berton, est franc-maçon anticlérical.

Pour faire vite, commençons par l'affaire Ullmo... C'est plus facile, il a sa page wikipédia à lui :
En 1907, Charles Benjamin Ullmo est jeune officier de marine opiomane qui, en plus de son hobby couteux, doit entretenir une maîtresse. Il a quelques soucis d'argent. Il décide donc, cette année là, de chouraver deux ou trois documents (en fait il en fait des photos) pour les revendre à l'ennemi... Oooh trois fois rien :  
"les codes confidentiels des signaux de la Marine, l'état de la flotte en Méditerranée et de la défense de Toulon" [là, j'ai cité Wikipédia]
De manière assez cocasse, il essaya de vendre les documents aux Allemands, mais comme la transaction avait échoué, il fit du chantage auprès du ministère de la Marine, en lui réclamant de la thune. On lui tendit alors un piège... 
"Ah ça mais, bien sûr apportez nous donc ces documents mon bon monsieur" [là je ne cite personne, je brode].
Il se fit donc gauler et fut condamné à l'exil à vie en Guyane, en passant par la case bagne.

Pour Berton, c'est un peu plus compliqué, parce que je n'ai pas de page wikipédia, mais en gros et en reprenant les informations d'un article du Cri de Paris en août 1918, revenant 10 ans plus tard sur cette affaire
Louis Berton, 37 ans en 1907, travaillant dans le commerce de laines, d'objets d'art et d'antiquités, mais également officier de réserve, se rendit dans un hôtel strasbourgeois (déjà c'est louche). Là, un type qui logeait dans la chambre mitoyenne de celle de Berton, entendit celui-ci converser avec un autre type à l'accent germanique (en même temps à Strasbourg, bon) de choses et autres, et notamment, je cite le Cri de Paris
"de l'obus Robin, de plans divers et de cours de l'école de guerre"
Le voisin de chambre dénonça donc Berton. Ce dernier et sa femme furent placés sous surveillance par la Sûreté, leur correspondance fut saisie, puis il furent arrêtés et jugés.
La femme de Berton fut relaxée, mais Berton fut reconnu coupable avec toutefois des circonstances atténuantes, et condamné, au choix, à la déportation simple ou à une détention de 5 à 25 ans. Berton choisit donc l'exil et fut envoyé sur l'île de Pins en Nouvelle Calédonie, sa femme l'y rejoignit plus tard. Le procès ayant eu lieu à Huis-clos les articles des journaux sont plutôt chiches de renseignements, donc je ne peux pas vous en dire beaucoup plus à moins de faire un VRAI travail de recherche... Je ne le ferai pas, parce que moi ce qui m'intéresse c'est l'image à la con au-dessus.
Un des chiches articles sur le jugement de l'affaire Berton dans le Temps, du 31/07/1908 (dans la rubrique "Tribunaux")


Revenons à la belle image du Petit journal illustré daté du 10/11/1907

Les plus de cette image :

1) On a un belle foule en colère, avec toutes les représentations sociales qu'on représente à l'époque... Pas beaucoup de femmes, donc, à part Marianne et la mère avec son bébé dans les bras. Mais de l'Armée à la Justice en passant par les ouvriers et les agriculteurs on a ce que l'on fait de mieux en matière de foule française en colère en 1907.
 

2) On a Marianne en cuirasse dorée (non pas bleue, nooooon) et bonnet phrygien portant vaillamment le drapeau tricolore qui flotte, mais pas trop haut pour qu'il soit bien dans l'image.

Les moins :

1) Qu'est-ce qu'ils vont faire ? là ? Clairement ? tous ? Leur donner des coups de poings, leur marcher dessus, leur jeter leurs enfants.... MAIS CE SONT DES PORTRAITS BORDEL ! c'est même pas les vrais gars. Alors ça va, calmez vous déjà

2) On a un problème d'échelle entre Marianne et le bon populo autour.
Je m'explique :
Soit Marianne est au milieu de la foule, alors tu la représentes à la même échelle que tout le monde. C'est la Liberté guidant le peuple, ça humanise et fragilise l'idée portée par le symbole, mais en même temps ça lui donne corps, on peut s'identifier. C'est cool.
Soit Marianne est au dessus de tout ça, cette idée là messieurs dames est plus forte que vous ou moi, c'est la Nation, une forme de déesse au dessus de la mêlée. La Marianne de la place de la République, vous voyez ?
Et là on a quoi : une Marianne le cul entre deux chaise qui  fait bien son 3m 50 de haut et du coup on a l'impression de Gandalf au milieu des Hobbits. C'est un peu con.

3) Un gros problème de regard dans cette image :
Marianne montre bien de la main les deux portraits à la foule belliqueuse mais elle ne les regarde pas... Non elle regarde au loin. Notez qu'elle a quand même l'oeil gauche qui regarderait biengnnnn... Mais non ! Et du coup on a l'impression qu'elle louche.
  • Ça fait un peu concon avouez :
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 


- Regardez les traiiiiitres, là ! *geste ample du bras et de la main*
- Heu où ça ?
- Làààà ! *re-geste*
- Gandal... heu Marianne, c'est la route que tu nous montres, là, y'a que des cailloux.
- Ah oui mais moi j'ai pas le droit de regarder à terre. Moi on m'a dit "tu regardes la ligne bleue des Vosges". Alors va falloir vous en contenter les gars ?
- Bon OK on va se débrouiller. *se retourne vers l'arrière* les gars ramenez les gros œufs peints on va les mettre ici.

Je vous remercie de votre attention.

mardi 10 février 2015

MacaÂabrerie #6 : Petit journal, supplément illustré, 09/10/1898, 23/09/1900 et 11/07/1909

Bonjour,

On continue les notes faciles à faire, grâce au Festival du domaine public, qui va finir par m'intenter un procès quand ils en auront marre d'être associés à tant d'horreurs.

La MacaÂabrerie d'aujourd'hui prend fait et cause pour nos amis chasseurs qui aimeraient beaucoup que l'on réhabilite leur si belle et saine activité cynégétique. Voilà qui sera donc fait avec ces trois belles images de chasse.

  • Dans son n° du 9 octobre 1898, le Supplément illustré du Petit journal, met en avant une chasse méconnue mais pourtant passionnante :
On ne rentre JAMAIS bredouille de la chasse aux enfants
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 


  • Le n° du 23 septembre 1900 du même Supplément illustré du Petit journal, nous montre que, bien évidemment, cette activité reste dangereuse, mais les accidents sont heureusement fort rares :
Terrible accident de chasse, en effet : un petit oiseau est tué lors d'une battue à l'enfant
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 


  • Une activité qui est sans doute appelée à se démocratiser, comme nous le montre cette illustration dans le n° du 11 juillet 1909 du Supplément illustré du Petit journal :
Ce citadin estime également avoir le droit de s'adonner à son sport préféré
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France 

Voilà sans doute pourquoi l'on dit qu'il ne faut pas laisser les enfants jouer avec des armes à feu, ils pourraient avoir envie de se venger, ces petits salopiauds.

Je vous remercie de votre attention et j'espère vous revoir bientôt pour une nouvelle note.

vendredi 6 février 2015

Calendrier pompier 2015. Janvier : Le Monde illustré, 25/04/1896

Bonjour,

J'avais bien aimé faire un calendrier il y a deux ans, aussi vais je me lancer à nouveau dans l'aventure. Et en plus ça me force à faire au moins une note par mois.
Il ne s'agira point cette fois-ci de Môssieurs faisant les muscles et de Médèmes faisant la pose. Non, j'ai voulu consacrer le calendrier 2015 à un pan de l'art souvent négligé : 

Le gros art moche qui tache !

Alors je sais tout ce que vous allez me dire : tout est subjectif là dedans, tu... Donc je vais couper court tout de suite en vous disant : oui je le sais. Aussi laisserais-je un droit de réponse à qui veut défendre la non-mochitude des images que je vais vous présenter chaque mois.

Mon gros art moche qui tache, tache d'autant plus qu'il met en avant un propos qui tache, lui même, salement : gros nationalisme, gros colonialisme, gros racisme... Et là, je sais aussi, que c'est un peu dégueulasse de retirer un propos de son contexte historique, mais... Je m'en bat un peu la rate, parce que mon propos sera de me ficher allègrement de la tronche des peintures, gravures, sculptures et éventuellement textes vraiment, mais vraiment, concons et que je vais vous présenter ici. Et puis peut-être, qui sait, petit à petit, pourrons-nous dresser ensemble une forme de parallèle avec notre époque propice aux emportements nationalisto-racisto-xénophobiques de toutes sortes.

J'aurais pu appeler mon calendrier 2015 : calendrier du gros art moche qui tache, oui j'aurais pu faire ça. Mais je ne l'ai pas fait, et dans un élan calembouresque, j'ai préféré l'appeler Calendrier pompier, en référence bien évidemment au calendrier des pompiers et à l'art pompier qui est quand même salement moche et exalte bien souvent les figures et symboles nationaux, dont je ne suis pas particulièrement friand, à part pour m'en gausser grassement.

Ma belle image du mois de janvier, si l'on oublie le fait qu'elle arrive en février, est un bon début, je trouve, dans le gros art moche qui tache, d'autant que je vous présenterai peu, voire plus du tout, de tableau par la suite.


  • Il s'agit d'une reproduction (gravure de M. Baude) d'un tableau de M. Jean-Joseph Weerts intitulé Pour l'humanité, pour la patrie, dans le n° du 25 avril 1896 de la revue Le Monde illustré :
Pfiou ça va pas être évident d'établir le constat

On a pas mal d'élément du gros art moche qui tache :
- le drapeau que le gars tient encore dans son dernier râle.
- le gars qui meurt bien bien théâtralement et qui est beau mais beau, haaaan qu'il est beau... Il ressemble d'ailleurs beaucoup à un certain Môssieur.
- Un Jésus, mais là je juge pas. C'est juste qu'on se demande ce qu'il fout là, planté... Lancé par une catapulte géante ? Il n'est même pas en arrière plan ou flottant au dessus. Même, tiens, il serait à genoux, au sol avec le gars dans ses bras, ça ferait moins bizarre. Là, le Jésus on sent qu'il aimerait bien filer un coup de main, mais, pas de bol, ses mains, justement... hein !
- Je passe sur le ciel lourd et chargé, qui est quand même la moindre des choses, y'a mort d'homme et sacrifice au nom de la patrie quand même.
- En parlant de patrie, C'est surtout dans le titre que l'on trouve la quintescence du gros art moche qui tache :
Pour l'Humanité, pour la Patrie
Généralement quand on a une patrie et qu'on la défend, on ne fait pas forcément (entendez : JAMAIS) un boulot pour l'humanité entière... Ah ça on aimerait bien, on le dit beaucoup, mais non non non, je vous assure. C'est pas antinomique, notez bien, parce qu'on n'est pas à l’abri du coup de bol, mais n'empêche qu'on ne l'a pas encore vu.


  • À propos du titre, je vous mets ici le petit encart expliquant ce tableau dans le même n° du Monde illustré :
En résumé, ils aiment bien, c'est joli et puis il fallait y penser dites donc, chapeau l'artiste.

Quand on lit ça on se dit qu'un peu plus Jésus il prenait un fusil et il lui filait un coup de main à notre dragon pour buter du schleu à grand coups de baïonnette dans la paillasse... Mais pour l'Amour des hommes hein, ah non on rigole pas avec ça.

Pour en finir avec ce tableau, je trouve qu'il y a au moins deux choses qui l'aurait vraiment rendu grandiose :
- Un des personnages aurait pu jouer la Marseillaise au clairon, ou au Kazoo, ou du moins siffloter..
- Je constate également un manque étonnant de Marianne. Héé ça va y'a plein de vide dans le tableau, on peut mettre 5 ou 6 petites Marianne, si on veut, ou deux grandes.

Je vous remercie de votre attention et n'oubliez pas même si Jésus aime tous les hommes, faites quand même gaffe de quel côté de la frontière vous êtes.